Nombre de stratégies rencontrent des difficultés de déploiement, c’est un phénomène bien connu des dirigeants. Les difficultés peuvent être d’ordre motivationnel, organisationnel, budgétaire, technique et empêchent la concrétisation du plan de développement.
Rappelons-nous de la mésaventure Polaroïd, ce géant de la photographie instantanée avait pourtant annoncé dans tous ses rapports annuels : la « photographie digitale est notre priorité stratégique n°1 », et ce pendant 15 ans, jusqu’à son déclin.
Une phase importante avant de déployer la stratégie est souvent sous-estimée : celle de la définition de la tactique, du plan de transformation. Définir ou réactualiser son plan stratégique signifie faire des choix, créer de nouveaux marchés, repenser ses offres, faire évoluer sa culture, ses méthodes.
Pour que cette feuille de route soit activable, réaliste à déployer, il convient de réallouer les ressources, réaffecter les priorités, redéployer les moyens.
Ideas are easy, execution is everything » –
John Doerr (économiste et investisseur américain)
Vous avez décidé de moderniser votre offre de services, vos produits, certes, mais avez-vous défini la tactique à employer ? L’impact sur l’activité commerciale, l’acquisition de nouvelles compétences techniques, l’identification sous-traitants, la création d’une nouvelle marque, les partenariats potentiels avec des start-up, les synergies ou joint-ventures possibles avec un client clé ? Les aspects internes seront aussi adressés car ils participent directement à la transformation : comment créer l’envie dans vos équipes internes et faire évoluer les compétences et modes de travail ?
Les réponses pourront varier selon le segment marché, la gamme produit, le contexte.
Ces éléments de tactique doivent être clarifiés au sein du comité de direction avec que le déploiement ne soit pris en charge par un ou plusieurs pilotes.
La méthode de l’impact mapping apporte ici un outil redoutable d’efficacité. bien connu pour définir les fonctionnalités d’un nouveau produit, elle prend aussi tout son sens dans une démarche de feuille de route stratégique. Voyons-en les contours.
Les différentes lignes projet du plan stratégique sont interdépendantes, ont des relations dynamiques entre elles et nécessitent des nombreuses interactions entre acteurs internes et externes à la structure. L’impact mapping permet de visualiser ces liens, d’aider les équipes à aligner leurs activités sur les objectifs business et vise à éviter les tergiversations ou blocages lors des phases d’innovation et de conception.
Source : Andre de Godoy Nunes
L’atelier de type “impact mapping” va permettre d’adresser les questions fondamentales:
- « Why (Buts)? »: pourquoi faisons-nous ceci ? Quel est l’objectif ? Est-il SMART (Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste et Temporellement défini) ? Qu’attend t-on comme retour sur investissement ? Dès cette phase, les participants pourront voter pour les enjeux les plus stratégiques;
- « Who (Acteurs)? » : qui est en mesure d’agir (externes à l’entreprise ou au service en priorité, puis internes) ? Qui sera un frein ? Qui utilisera notre produit ? Qui sera impacté? L’approche visuelle nous permettra d’appréhender de façon rapide qui sont les acteurs critiques, voire les compétences manquantes;
- « How (Impacts)? » : comment les parties prenantes contribuent à l’atteinte des objectifs ? Comment peuvent-elles être un obstacle ? Pour chaque acteur identifié, définissons son rôle et les changements à y apporter.
- « What (Livrables)? »: sur quels éléments devons-nous agir ? Quelles sont nos actions pour aider les acteurs ? Que pouvons-nous construire, proposer, livrer ? Quels sont les éléments à forte valeur ajoutée ? Cette dernière question pourrait être traitée plus tôt dans la démarche, après la phase “Why” par exemple, mais on risque alors d’auto-justifier les actions sans les challenger. Si l’étape “What” est amenée en fin de démarche, elle permet de faire émerger des actions en lien direct avec les objectifs et les acteurs identifiés.
Il s’agit dans cette phase de détecter les projets inutiles, de les stopper avant de commencer à gâcher les énergies et les ressources, de manager l’impact des chantiers sur l’organisation et la relation client dans son ensemble.
Cette méthode est participative, elle permet l’appropriation et le partage des axes clés par l’équipe de direction et favorise l’exploration de chemins différents pour atteindre un même objectif. Elle présente l’avantage d’être rapide à mettre en œuvre. Ce sont de précieuses semaines et ressources qui peuvent être économisées pour un passage à l’action fluide, reposant sur une tactique partagée.
L’originalité de l’approche impact mapping réside dans l’identification de tactiques alternatives vers un même objectif : « stop making roadmaps, make a map with roads ». Contrairement à une roadmap linéaire, elle va favoriser la mise en oeuvre d’expérimentations rapides et permettre d’objectiver leur résultat.
Factuellement, la stratégie est : « l’art de coordonner des actions, de manœuvrer habilement pour atteindre un but », tandis que la tactique renvoie à un « ensemble de moyens habiles employés pour obtenir le résultat voulu», c’est un guide pour agir au quotidien et trouver les bons moyens de rendre réelle la stratégie, faire le lien entre la théorie et la pratique.
Ainsi, la contribution de chaque chantier identifié au sein du plan d’action est clairement déterminée.
C’est une excellente méthode pour se focaliser sur l’impact recherché (par exemple développer ses parts de marchés) plus que sur le produit trop rapidement, car il n’est qu’un élément de réponse parmi d’autres. Une fois cette « big picture » créée par l’équipe de direction, il sera temps d’entrer en conception, de façon beaucoup plus sereine.
2 articles pour aller plus loin :
- Comment supporter de manière efficace une approche systémique et empirique tellement nécessaire dans un environnement VUCA (Volatile Uncertain Complex Ambiguous).
- L’impact mapping pour constuire un plan d’action, la démarche WHY, HOW, WHO et WHAT.